Je suis particulier ou professionnel, que faire si mon cocontractant a prévu une clause excluant sa responsabilité dans l’accomplissement de ses obligations ?
Autrement dit, je suis engagé par un contrat et une clause d’exclusion de responsabilité me semble abusive, puis-je la contester ?
Oui, une protection générale est offerte par le Code civil dès qu’il y a contrat et quel que soit la qualité de la personne concernée c’est-à-dire soit professionnel soit particulier.
L’article 1170 du Code civil est applicable et il prévoit que :
« Toute clause qui prive de sa substance l’obligation essentielle du débiteur est réputée non écrite »
Par exemple, est considérée comme une clause devant être sanctionnée sur ce fondement les cas suivants :
- En matière de cession de fonds de commerce :
«Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X…, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Colo, a vendu à M. et Mme Y…, par l’intermédiaire de la société Must immobilier (la société Must), le fonds de commerce de bar-restaurant de celle-ci ; que quelques jours après la vente, les acquéreurs ont appris que le commerce n’avait jamais obtenu l’autorisation d’ouverture en raison d’un avis défavorable de la commission communale de sécurité et que la terrasse n’était pas conforme au permis de construire ; que l’établissement ayant fait l’objet d’une fermeture administrative et que le bail ayant été résilié, M. et Mme Y… ont assigné M. X…, ès qualités, la société Must et son assureur, la société Axa France (la société Axa), en résolution de la vente et en responsabilité ;
[…]
Attendu qu’en statuant ainsi, alors que M. X…, ès qualités, qui avait comme obligation essentielle de délivrer le fonds de commerce pourvu d’une autorisation d’ouverture, ne pouvait s’en exonérer par une clause élusive de responsabilité qui, contredisant la portée de son engagement, devait être réputée non écrite, la cour d’appel a violé les textes susvisés ; » (Com., 9 juin 2009, n°08-10.350)
- Il s’agit là d’un couple de commerçants qui avait acquis un fonds de commerce et qui finalement après la cession du fonds, se sont rendus compte que ledit fonds de commerce n’avait jamais eu d’autorisation d’ouverture. Le commerce ne pouvait donc pas ouvrir. Une clause de la cession prévoyait une exclusion de responsabilité pour le cédant du fonds. La Haute Juridiction a jugé qu’une telle clause ne pouvait pas être présente dans le contrat de cession de fonds de commerce et cette décision permet ainsi aux acquéreurs du fonds de demander à ce que la cession soit résolue c’est-à-dire annulée.
- En matière de vente de billets de transports :
« Attendu que M. X…, qui projetait d’effectuer un séjour à La Réunion avec trois membres de sa famille, a acheté quatre billets d’avion pour un trajet aller et retour Paris-Saint-Denis de la Réunion ; que le retour, qui devait être assuré par la compagnie Corsair international, le 10 novembre 1997, à 12 heures 45, a été reporté au lendemain à 11 heures en raison d’une panne affectant le moteur de l’appareil ; que M. X…, invoquant des obligations professionnelles lui imposant d’être à Paris le 11 novembre, a refusé d’attendre l’avion de remplacement et acheté quatre billets permettant un retour par la compagnie AOM le jour même, à 21 heures ; qu’il a assigné la société Corsair international en réparation de son préjudice ;
[…]
Mais attendu, d’abord, qu’ayant constaté, par motifs adoptés, que le départ du vol avait été différé de 24 heures et que l’importance de ce report ne permettait pas de l’assimiler à un « simple retard »,la cour d’appel, caractérisant ainsi le retard excessif pour lequel le transporteur ne saurait s’exonérer à l’avance de toute responsabilité sans porter atteinte à l’essence du contrat de transport aérien de personnes, a pu écarter l’application de la clause relative à la non garantie des horairesinvoquée par la société Corsair international ; »
- La cour de cassation considère ici que la compagnie aérienne n’a pas rempli le contrat de transports de personne en ce que le retard était excessif, plus de 24 heures, et que l’obligation de transport des personnes était de ce fait atteinte. Peu importe que la compagnie ait pris le soin de glisser une clause écartant sa responsabilité en cas de retard. A noter que dans certains cas de retard de vol, le Règlement européen n° 261/2004 du 11 février 2004 peut trouver à s’appliquer.
Cet article peut également être appliqué à d’autres clauses qui privent de sa substance l’obligation essentielle du débiteur (l’un des contractant) et il s’agit alors de se référer aux obligations respectives des parties et à l’objet du contrat au cas par cas.